Le 17 mai dernier, Édouard Philippe nommait François Nyssen au ministère de la Culture. Cette Belge naturalisée française, connue pour diriger la maison d’édition Actes Sud, possède une autre carte très peu connue du grand public : elle est une « anthroposophe »...
L’anthroposophie est une philosophie occulte traitant de l’Homme et son environnement naturel et surnaturel. Née en 1910 d’une scission au sein de la mouvance théosophe de Blavatsky, « l’anthroposophie se déclare d’un caractère universel et veut s’appliquer à une large diversité de domaines [1] », notamment l’éducation (écoles Steiner-Waldorf), la musique (eurythmie), l’agriculture (biodynamie), la médecine (Mercure Fédéral) ou encore la banque (NEF).
En 2007, des branches nationales de la société anthroposophique étaient établies dans 50 pays, et 10 000 institutions dans le monde avaient pour fondement l’anthroposophie. L’anthroposophie, développée par Rudolf Steiner, un autrichien né en 1861, qui aurait reçu ses enseignements directement des dieux [2], est qualifiée de secte par les spécialistes des mouvements sectaires, par les commissions d’enquête française et belge, et par un rapport des renseignements généraux de 1997.
Quelques croyances anthroposophes
Le Christ est descendu du Soleil.
Le Bouddha s’est réincarné sur Mars.
Mars est une planète liquide.
Le cosmos s’arrête à Saturne.
Ce sont les Gnomes qui font pousser les plantes.
La Résurrection du Fils de Dieu aurait engendré le phénomène de la radioactivité.
L’Atlantide n’est pas un mythe, mais un continent où les hommes avaient des corps cartilagineux capables de s’étendre à volonté.
Les blonds ont une intelligence cosmique.
Ceux qui ont beaucoup de taches de rousseur étaient des imbéciles dans leur précédente incarnation.
L’organe sexuel du futur sera le larynx.
Les hommes et même la Terre se réincarnent [3].
Françoise Nyssen, une anthroposophe active
Francoise Nyssen est au premier rang de la bataille culturelle menée par l’anthroposophie.
Notre nouvelle ministre de la culture et son époux Jean-Pierre Capitani créent en 2015 l’école du « Domaine du possible » dans les locaux de sa maison d’Editions Actes Sud, sur la ferme de Volpelière.
Le choix du directeur n’est pas laissé au hasard : c’est Henri Dahan, le délégué général de la Fédération Steiner-Waldorf France lui-même, qui occupera ce poste et enseignera aux élèves. Les écoles Steiner-Waldorf sont une émanation directe de la mouvance anthroposophique dont le but est d’aider les enfants à s’incarner progressivement à travers des rituels, des prières et des danses conformes à l’enseignement de Rudolph Steiner, fondateur de l’anthroposophie.
« Le rôle de l’enseignant est d’équilibrer ces processus d’édification en agissant sur les forces spirituelles notamment par le choix et la durée des matières enseignées, chacune stimulant plus ou moins l’aspect “spirituel/cosmique” ou “matériel/terrestre”. Par exemple, un enfant chez qui l’organisation cosmique prédomine, repérable par la beauté plastique de son visage, devrait faire de l’histoire et de la géographie alors qu’un enfant terrestre devrait être “spiritualisé” avec de l’eurythmie. »
Société Anthroposophique de Belgique au sujet des écoles Steiner-Waldorf [4]
Des week-ends entre anthroposophes
Dans le numéro de septembre-novembre des Nouvelles de la Société anthroposophique en France, il est possible de trouver un long article intitulé « Partir du point zéro », où Francoise Nyssen évoque sa conversion à l’anthroposophie [5].
Cet article relate une collaboration étroite entre les dirigeants des Éditions Actes Sud et l’un des membres du Comité Directeur de la Société anthroposophique universelle, Bodo von Plato. Ainsi, il apparaît que les réunions officiellement organisées par le mouvement de la Spiritualité laïque étaient en fait conçues et organisées par la Société anthroposophique et des membres de la
Fédération des écoles Steiner-Waldorf avec Bodo von Plato, Praxède et Henri Dahan, Françoise Nyssen et Jean-Pierre Capitani.
« Bodo von Plato : L’école ne sera pas présentée aux parents comme une école Steiner ou Waldorf (…) »
« Louis Defèche : Qu’est-ce qui est important dans ce thème de la spiritualité laïque, pourquoi l’avoir choisi ?
Jean-Paul Capitani : Quand on prend la responsabilité d’éduquer des enfants, on ne peut pas évacuer la problématique de la spiritualité. Dans toutes les parties du monde, on n’hérite pas seulement d’un corps, on hérite aussi de la spiritualité de ses ancêtres, de ses parents, et d’une culture. Et cela peut être un facteur de souffrance, une espèce d’hypothèque. Donc si on pose cette question de la spiritualité, ce n’est pas pour transmettre une ancienne spiritualité ni pour en produire une nouvelle pour les enfants, mais pour leur ouvrir les portes, pour qu’ils se sentent libres de comprendre la poésie, d’aider le monde, d’aimer ce qu’ils trouvent beau, dans un univers stimulant et ouvert. La spiritualité ne doit pas être un héritage, elle doit être une découverte. »« Louis Defeche : Comment liez-vous anthroposophie et spiritualité humaine ?
Bodo von Plato : Pour moi, c’est absolument la même chose, nommée différemment. »« Françoise Nyssen : (…) Je viens d’une famille où régnait l’inverse de la spiritualité, très anti-catholique, franc-maçonne, avec des grands-parents très investis là-dedans, dans une Belgique qui luttait contre l’université catholique… J’ai toujours été dans une espèce de rationalisme et il a fallu un choc, un drame pour que tout d’un coup le voile se déchire et que la spiritualité parvienne au centre de ma vie. Je dirais que ces week-ends sur la spiritualité ont été fondamentaux à travers la rencontre avec les gens, les moments où on est ensemble, où on se touche juste par un sourire. Il n’y a pas que le moment de la réception d’une parole – qui a été magnifique – mais aussi toutes ces petites choses qu’on a réussi à partager. »
Un choix étonnant d’Edouard Philippe
pour une ministre de la Culture française
L’anthroposophie exècre la langue et à la culture françaises, comme l’illustre ce texte de 1923 de son fondateur et unique prophète Rudolf Steiner :
« Naturellement, il y a dans l’élément espagnol et italien quelque chose de plus vital que dans le français. Le français est, parmi les peuples latins d’Europe, celui qui porte le moins de vie. La langue française est, parmi toutes les langues qui peuvent être apprises en Europe, celle qui, si je peux m’exprimer ainsi, pousse l’âme des hommes à la surface, à la surface la plus extrême de l’être humain. Elle serait celle qui peut conduire l’homme à mentir de la manière la plus honorable à la plus frivole. Elle se prête d’autant plus à cela qu’on peut y mentir de manière spontanée et loyale, parce qu’elle n’a plus aucun lien juste avec l’intériorité des hommes. Elle est parlée tout à fait à la surface de l’homme. Ainsi de la langue française, et donc de l’être français, découle l’attitude psychique telle que l’âme est commandée par la langue française. Alors qu’en allemand, l’âme, dans la puissance de l’élément volontaire, a la configuration interne de la langue, et la forme plastique de l’être de la langue, la langue française rencontre un engourdissement, et c’est elle qui commande. C’est une langue tyrannisant l’âme et par là elle crée ce qui la conduit au vide, de sorte que la culture française tout entière est, sous l’influence de sa langue, une culture qui vide l’âme. Celui qui a une sensibilité pour de telles choses peut toujours ressentir qu’aucune âme, réellement, ne parle à partir de l’Être français ; seule, une culture formelle et figée en émane. La différence est, à proprement parler, que l’on est conduit, en français, à se laisser commander par la langue. Cette liberté infinie que l’on a en allemand – et que l’on devrait revendiquer plus que cela n’est fait – de pouvoir placer le sujet à un endroit quelconque, en fonction de sa vie intérieure, cela, on ne l’a pas en français. »
Réactions des médias aux ordres
« Françoise Nyssen, une éditrice sur tous les fronts. » (Le Figaro)
« Françoise Nyssen arrive rue de Valois avec la réputation d’une femme toujours en mouvement, qui aime faire les choses et aller au bout de ses projets. » (Libération)
« Françoise Nyssen, ministre de la Culture, a créé une école où il fait bon étudier. » (Speech)
« Son travail a été loué par des membres du monde littéraire comme l’écrivaine Karine Tuil ou encore le Président du syndicat national de l’édition Vincent Montagne. Les mots qui reviennent le plus souvent sont “digne” et “talentueuse”. [...]
“Je vous demande beaucoup d’indulgence”, a déclaré la nouvelle ministre en prenant ses fonctions rue de Valois dans le ministère qui fut celui d’André Malraux et Jack Lang. Elle a salué le bilan d’Audrey Azoulay se déclarant “admirative” des résultats obtenus par la ministre sortante. “Je n’imaginais personne à qui il m’aurait fait plus plaisir d’offrir les clefs de ce ministère”, lui avait dit auparavant Audrey Azoulay, au cours de la cérémonie de passation de pouvoir. [...]
À la suite de la disparition de son fils Antoine, un enfant différent qui a souffert à l’école, Françoise Nyssen a fondé avec son mari une école, qui accueille aujourd’hui une centaine d’élèves, de la maternelle au lycée et qui propose des méthodes d’apprentissage alternatives "s’appuyant sur sur la coopération, la curiosité des enfants". » (franceinfo)
« Nommer Françoise Nyssen à la tête du ministère de la culture, c’est très bien joué. Parce que cette femme est inattaquable. Elle ne risque pas grand-chose du grand public, qui a d’autres chats à fouetter et ne la connaît pas. Non, le danger vient toujours du milieu culturel. Qui ne peut que la respecter. Comment contester la formidable aventure des éditions Actes Sud, qu’elle dirige ? Comment ne pas saluer la réussite d’une maison installée à Arles (Bouches-du-Rhône) mais connue dans le monde entier et qui, en 2015, a remporté le prix Nobel de littérature avec Svetlana Alexievitch et le prix Goncourt avec Mathias Enard ? » (Le Monde)
« On l’attendait au Festival de Cannes, parmi les étoiles du cinéma et les paillettes. C’est le populaire parc de la Villette, dans l’Est de Paris, que la nouvelle ministre de la Culture, l’éditrice de la maison Actes Sud, Françoise Nyssen, a choisi pour sa première sortie officielle. “C’était important de venir sur un lieu où je pouvais rencontrer des acteurs du monde culturel, mais aussi des enfants, a-t-elle confié à quelques journalistes. La Villette, ce sont les sciences, la musique, des expositions, des ateliers artistiques ou encore des jardins, de quoi nourrir le cerveau de tous les enfants pour en faire des adultes responsables.”
Très à l’aise dans ses ballerines grises, chic et décontractée, pantalon noir, chemisier blanc et pull tout doux bleu ciel, la ministre n’a pas boudé son plaisir de se laissée guider par Didier Fusillier, le président de la Villette. » (Le Parisien)